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18 juillet 2013 4 18 /07 /juillet /2013 11:46

 

En ce samedi 6 juillet 2013, je vais enfin participer au raid 974. Cette course m’attire depuis l’édition 2010 où j’avais assisté à la victoire de Mr Thierry Chambry devant Mr Jean Hugues Vos. Je profite de ce récit pour saluer Thierry qui retrouve progressivement les sentiers après une longue absence sur blessure et Jean Hugues qui va revenir sur l’île en octobre prochain pour participer au zig zag des fous.

 

 

RAID 974 affiche 2013 base logos

 


L’année passée, alors que je m’étais inscrit à ce bel ultra de 101 kms, j’avais dû annuler au dernier moment du fait d’une vilaine tendinite au genou. Mais, c’est du passé, je suis désormais prêt à en découdre avec l’aventure du jour, le raid 974, une traversée de l’île entre Le Port et St Joseph. Une course "roots" qui va nous faire progresser sur un parcours magnifique de Mafate à Cilaos, du coteau Kerveguen à la Plaine des Cafres, du Volcan à Grand Galet.

 

parcours grand raid 974 grand


3H 15 au Port, je passe au pointage et discute avec Eric, mon chauffeur du jour.

 

 

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Quelques lignes droites afin de me réchauffer. Je me sens lourd avec mon petit paquetage sur le dos (environ 5 kg).

L’épreuve souvent décriée par son côté minimaliste, en terme de balisages et de ravitaillements, impose de bien préparer son affaire. Pour le parcours, j’ai étudié les cartes, effectué des reconnaissances et pris des renseignements auprès des organisateurs. Merci à Christian pour ses informations précieuses.

Pour ce qui est des ravitaillements et bien je porte ma maison sur le dos. Je ne veux pas me retrouver à sec de glucides. Pour l’eau, je prévois de faire le plein au niveau des ravitaillements officiels mais aussi en utilisant les robinets lacour ou encore l’eau directement prélevée à la source ! De même, comme je ne joue pas avec le feu ou plutôt avec le froid, je pars avec l’équipement indispensable en prévision d’une nuit fraîche du côté du Volcan (k way, gants, bonnet,..).

 


Quelques coureurs ont réglé cette problématique des kg en trop en prévoyant une assistance personnalisée. Pour ma part, j’ai fait le choix de ne pas faire appel à des connaissances pour me ravitailler à Cilaos, à Mare à Boue ou encore au Volcan. D’une je n’aime pas déranger, de deux je ne peux pas affirmer mes horaires de passage, de trois j’adore m’alourdir pour le plaisir. J’ai bien établi une feuille de route avec mon dalon Gino mais je sais trop bien l’incertitude de ce type de prévisionnel.

Tiens en parlant du loup, Gino pointe son nez ou plutôt sa bouche, qu’est ce qu’il est bavard ! Il était temps, 20 minutes avant le départ ! Mr a engrangé le maximum de minutes de sommeil. En parlant de prévisionnel, voici celui de Gino et donc le mien.

 


Départ LE PORT 00h00'

+3h

Ravitaillement ILET DES ORANGERS 3h00'

+1h15'

Ravitaillement ROCHE PLATE 4h15'

+2h

Ravitaillement MARLA 6h15'

+3h15'

Ravitaillement BRAS SEC 09h30'

+3h15'

Ravitaillement MARE A BOUE 12h45'

+2h15'

Ravitaillement PITON TEXTOR 15h00'

+1h

Ravitaillement PLAINE DES SABLES 16h00'

+3h

Ravitaillement GRAND GALET 19h00'

+53'

Arrivée SAINT-JOSEPH 19h53' soit une arrivée prévue à 23 h 53, allez juste avant minuit.

 


4 H 00, nous nous réunissons sous la banderole pour un départ imminent. Une longue journée, voire deux, nous attend.

 

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  Même avant le départ, je marche déjà les mains dans le dos ! Gino est déjà positionné avec son k way rouge.

 

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Didier Mussard copie Gino pour une bonne posture de départ. Pas sûr que ce soit efficace.

 

Deux décomptes et nous voilà partis dans la nuit sombre.

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Direction : le cirque de Mafate. Alors que les étoiles brillent par leur absence, je me reprends à deux fois avant de réussir à allumer ma frontale. Nous rejoignons rapidement la piste de la rivière des galets. Je me retrouve déjà seul, tout proche du groupe de tête comportant une quarantaine de coureurs.

 

Je me fais régulièrement doubler, ce qui me laisse perplexe. J’avance plutôt à un bon rythme mais ce n’est pas suffisant pour éviter les dépassements intempestifs. Hypothèse ironique : ayant une VMA à 19, ils doivent tous être à 20. Hypothèse plus probable : certains ont oublié qu’ils s’élançaient sur un ultra et pas pour un trail de 10 kms. Ayant l’habitude des courses où je remonte au classement, cela présage d’une belle journée.


La piste laisse place un chemin monotrace et à la première pente du jour. Ça ne chôme pas mais vraiment pas. Dans un virage, je jette un œil vers la piste des galets où s’étire une belle chaîne lumineuse. Les écarts sont déjà impressionnants.

 


17 minutes après le départ, je déboule sur le bitume de Sans Soucis. Des petits groupes se forment. Je connais bien cette route mais apparemment moins bien que d’autres qui n’hésitent pas pour emprunter des petits raccourcis péi. Cela énerve des coureurs qui s’agacent ouvertement. Perso, je reste concentré car ces mini coupes n’auront pas trop d’incidences. Ces tricheurs nous manquent de respect, manquent de respect à eux-mêmes. Cela en devient ridicule, je ne comprends pas.

 


Je rattrape un groupe et nous arrivons à la citerne rouillée à 4 H 37. La civilisation derrière, le bitume laisse place aux sentiers. Le rythme est bon, je me sens à mon aise, serein. Nous sommes en file indienne à travers les champs de canne et le suivi du balisage ne me pose pas de difficultés. Je sais qu’à chaque retour sur la piste forestière il faut se méfier pour ne pas louper le sentier. A plusieurs reprises, je suis obligé de rappeler des coureurs qui s’élancent sur un mauvais parcours. Dès que je peux, je relance et me mets à trottiner malgré la pente.

 


Au bout de 58 mn, me voilà sur la canalisation des orangers. Ce magnifique sentier de 11 kms, immense balcon étroit avec vue sur Mafate, permet d’amener l’eau des captages des ravines Grand Mère et Orangers jusqu’aux Hauts de Saint-Paul. Pour ceux qui ont le vertige, je vous conseille de passer de nuit. On oublie vite le vide qui est vraiment tout proche. Cela donne l’impression de progresser sur une piste large. Je trouve mon rythme rapidement et ne me laisse pas perturber pas le retour tambour battant de quelques coureurs pressés (sûrement un rendez-vous urgent aux orangers).

Arrivée au niveau de la cascade de l’ilet flamand, je prends mes précautions car le sol ressemble à une belle patinoire. Le silence est de mise, l’ambiance paisible, seules les lueurs des frontales viennent nous rappeler que nous ne sommes pas seuls.

 

A ma grande surprise, je reviens sur un des favoris annoncés en la personne de Teddy Loricourt. Cela m’alerte. Soit il n’est pas en forme (ce qui était finalement le cas), soit je suis parti trop vite. Etant peu bavard en course, je ne le questionne pas. Son rythme me convient alors je lui emboite le pas. Nous arrivons ensemble à l’ilet des Orangers (21 kms) vers la 50 ème place. J’avais prévu 3 heures pour arriver à l’ilet, je suis en avance puisque cela fait seulement 2 h 17 que le départ a été donné.

 

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Je remplis uniquement ma gourde puisque mon camel est encore bien plein. Parti avec l’objectif de boire 600-700 ml par heure, je suis encore loin du compte… Ma réputation de chameau des sentiers est donc bien fondée. Dès la sortie de l’ilet, j’éteins ma frontale. Je me retrouve à nouveau seul. Ah non, on me revient dessus, des pas de plus en plus présents. J’accélère…. Je reste un compétiteur, je n’y arrive pas. Ma course commence maintenant. Montée rapide jusque La Brèche où je reprends quelques coureurs qui semblent déjà bien entamés. Après une descente où j’essaye de rester souple, je traverse Roche Plate le sourire aux lèvres. Le paysage est grandiose.

 

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J’en suis à 3 H 05 de course. Certains remplissent leur camel à l’école. Moi, je trace. Pour me mettre en appétit, la remontée vers Trois Roches. Il faut réussir à maîtriser son rythme, relancer au bon moment, restez vigilant dans les descentes. Le soleil commence à pointer ses rayons, le climat est idéal. Au détour d’un virage, je croise Christophe, un collègue dénivien, venu faire une sortie au cœur de Mafate.

 

 

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Trois Roches, bonjour. J’adore cet endroit mais pas le temps de flâner. Une traversée de rivière où pour une fois je ne mets pas mes pieds dans l’eau. Je reviens sur un groupe d’une dizaine de coureurs. La densité est impressionnante ! Au fur et à mesure de mon retour, le coureur de devant s’écarte et me laisse passer. Sans rien y comprendre, je me retrouve en tête de groupe.

 

Nouvelle traversée de rivière avant une montée raide. Proche du sommet, je suis content de croiser coach Fred et Yannick qui m’annoncent 31 ème. Ok, indication intéressante mais il ne faut pas s’enflammer ! Je les informe de mon avance grandissante sur mon prévisionnel mais aussi et surtout de mon bon état de forme. Tous les voyants sont au vert. La préparation semble porter ses fruits. J’ai tout fait pour être prêt le jour J, l’objectif semble être atteint.

 


Il est 8 H 43 et me voici à Marla (34 kms. 4 H 43 au lieu des 6 H 15 prévues). Le ravitaillement a lieu au gîte de Mme Giraudet. Que de bons souvenirs passés à cet endroit lors de randos en famille ou entre amis.

 

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Je ne touche pas aux victuailles, demande de l’eau pour mon camel. On m’indique un robinet. Je le tourne, il me reste dans la main, l’eau explose dans tous les sens. Me voilà trempé. Bien la peine…. Rafraichî, un peu énervé, j’entame la montée en me basant sur une heure d’ascension. Je suis étonné de mon allure, de ma montée rapide. La première partie est assez abrupte avant de laisser place à une pente plus douce à l’ombre d’une forêt d’acacias.

 


Après 20 minutes d’ascension, j’entends un cri. Il s’agit (seulement ! ça m’a fait flipper) d’un coureur crampé. Alors que je lui demande si tout va bien, il sollicite mon aide afin de l’étirer. Je m’exécute, lui donne quelques conseils et m’en retourne à ma course. Le sommet se rapproche.

 


Me voici à la porte d’entrée vers Cilaos, altitude 2082 m. Il m’aura fallu, depuis le gîte, 33 mn pour arriver en haut du Taibit. Petite aparté, "Taïbit" signifie "crottes de lapin" en malgache, malicieuse expression pour désigner la forme du col vu de part et d'autre de la crête.

 

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Je ne m’attarde pas d’autant plus avec ce vent qui va vite me rafraichîr. Un dernier regard vers Mafate et je plonge vers Cilaos. L’intégralité de la descente s’effectue en solitaire. Je progresse rapidement emporté par la pente, par mon euphorie, par cette douce sensation de voler sur le sentier. Seul au monde. Pas tout à fait, je croise quelques randonneurs qui manifestent de belles frayeurs quand ils me voient débouler sur eux. « Bonjour, Merci, Au Revoir ». Après des passages en sous bois, je me retrouve à la plaine des fraises avant de continuer dans un décor de bois de couleurs, de pins, ou autres filaos.

 


Dans la dernière partie de la descente et alors que j’aperçois la route d’ilet à Cordes, je reviens sur un coureur. Au moment où je le rattrape, il accélère. Ce n’était que le début. Une fois sur la route, il me demande par où aller. Je lui réponds par la route. C’est alors que je le vois piquer un sprint ! Je reste scotché d’incompréhension. Drôle de tactique de course.

 

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Sur cette portion de parcours, je ne cours que dans la descente. Un peu esseulé, j’essaye de récupérer, de bien m’hydrater dans les montées effectuées en marche active. Nouveau sentier à gauche en direction de Bassin Bleu. Anecdote : Un concurrent a eu la surprise de voir une voiture venant de Cilaos déposer un coureur au pied du sentier. Le gars voyant qu’il avait loupé le bon chemin est revenu sur ses pas, certes en voiture, mais il a choisi de revenir en arrière plutôt que de se faire déposer à Cilaos.

 

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Au cours de la montée, ce qui devait arriver arriva. Je reviens sur le coureur fou, le dépasse et continue mon chemin. Je ne le reverrai plus. Une fois la pente gravie, le sentier est plus roulant. Ce sera mon premier coup de mou de la journée. J’avance mais avec moins de facilité. Un coureur revient et me dépose. Il s’agit de Willy (du fauxrhum grand raid). Ce sentier est agréable avec une vue régulière sur Cilaos qui se rapproche, mais pas assez vite. Passage sur le site de Bassin Bleu et nouveau virage à gauche vers la Roche Merveilleuse. ça grimpe dur, très dur ! Je garde ma technique de montée avec les mains dans le dos. Je n’arrive pas à faire autrement. Je comprends l’étonnement des coureurs doublés qui doivent me percevoir comme un mec limite provocateur.

 


Je suis à sec d’eau mais je me rassure en envisageant un ravitaillement au robinet situé sur le site de la Roche Merveilleuse. Mais mon plan tombe à l’eau puisque nous continuons à emprunter le GR. Je reviens sur Willy qui peste de s’être trompé de chemin. Je ne vois pas où . Il me lâche et s’éloigne à vive allure.

 


Au Bloc, je remplis ma gourde avec de l’eau sortant d’un bout de tuyau bien connu des coureurs. Un peu plus loin, je reviens de nouveau sur Willy et un autre traileur. Nous empruntons les sentiers qui longent la route. Et voilà mon coup de sang de la course. Je vois deux gars qui courent tranquillement sur le bitume. Je les interpelle mais ces messieurs sont atteints de surdité aigue. Parait-il que certains ont même utilisé une voiture pour avancer plus facilement. Quel est l’intérêt ? Il faut absolument renforcer les contrôles sauvages. J’ai fait part de mes doléances aux organisateurs.

 

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Dernière partie avant l’arrivée à mi course, au gîte des 3 Cascades à Bras Sec, 49 ème km. Je pointe après 7 H 36 de course (au lieu des 9 H 30 estimées). Je fais le plein d’eau et j’entends une voix familière. C’est Laurent Delnard qui exprime son mécontentement quant au balisage, à l’attitude de certains coureurs qui ne jouent pas le jeu. Il me salue puis s’éloigne avec un groupe de 4 à 5 coureurs. Je me ravitaille, ne m’attarde pas, et repars après une pause de 5 mn. Je serais bien resté flâner dans ce petit coin de paradis mais j’ai un mur qui m’attend : l’imposant rempart montant au Kerveguen.

 


Au pointage de Bras Sec, pour info : Freddy Thevenin ( 5 H 54), Didier Mussard (6 H 09), Wilfrid Oulédi (6 H 28), Georges Erick Nirlo ( 6 H 28), Mickael Guichard ( 6 H 38), Rene Fred Fontaine (6H 42), Frederic Berrichon (6H59), Joseph Lebon (6 H 59), Jovanni Libelle(7 H 10), Niel Bagoupaty (7H11), Jean Max Grondin (7 H 14), Gilbert Ah Fat (7H14), Jens Glasenapp (7 H 23), Patrice Payet (7H24), Dominique Eclapier (7 H 25), Laurent Delnard (7 H 27), Frederic Saint Fidele (7H27), Nicolas Touneji (7H 34), Jean Claude Guiton (7H36), Arnaud Fontana (7 H 36), Arnaud Moisan (7 H 36).

 

 

Une deuxième course débute. Je repars seul, essaye de manger une barre énergétique, mais l’essai est infructueux. Ce n’est définitivement pas mon truc, au contraire des gels. Un par heure depuis le départ. Le temps est couvert et dire qu’il va falloir se rapprocher du mauvais temps.


Je progresse entre les cryptomérias puis entre les bois de couleurs. Cela grimpe dur. Déjà une dizaine de minutes quant tout à coup, le sentier plonge ! Ah non. Tout ce que je viens de gravir et bien je le redescends! Grrrrrr. En fait, je suis sur le sentier des sources et pas encore sur le sentier de Kerveguen. Je retrouve mes repères quand j’arrive sur la piste forestière à proximité de la RD 241. J’y suis passé il y a un mois afin de repérer la mythique montée. J’avais alors mis un peu moins d’une heure. Donc je m’élance pour une ascension estimée en 1 H 10. Dès le panneau « sentier d’études kerveguen » je suis confronté au plat du jour, normal il est 12 h 00. Il est plutôt corsé. La pente est abrupte, très abrupte ! Il faut lever la jambe de plus en plus haut. Heureusement que je ne suis pas sujet aux crampes (en tout cas, pas pour le moment). Cela aurait pu devenir très pénible. Des petits replats permettent de souffler tant musculairement que psychologiquement.


A la vue de la plaque commémorative, mes pensées vont à Gérard Bordage, traileur décédé accidentellement en octobre 2002 pendant le grand raid.


Plusieurs échelles, neuf exactement, permettent de faire exploser l’altimètre. Je monte dans les nuages. Le froid commence à se faire ressentir, je mets mes manchons. Alors que j’avais la sensation de caler, de m’endormir sur le sentier, je reviens sur un coureur. Il s’agit de Dominique Eclapier. Il me demande si je connais le sentier et surtout cherche à savoir la distance qui nous sépare du sommet. Montant depuis 50 minutes, je lui annonce 20 minutes. Revigoré, Il repart de l’avant. Je lui emboite le pas. Un coureur nous revient dessus, me double pour finalement rester au rythme de Mr Eclapier. Au bout de 1 H 03, je débouche au niveau de la crête. D’un point de vue horaire, il est 13 H 03. Ça de fait. La vue sur Cilaos est bouchée et ça caille. Le vent et le brouillard sont présents. Pas question de traîner ici. Nous prenons la direction de Mare à Boue.

 

Les photos qui suivent ont été prise par Mr Michel Jourdan, runraid :

Freddy Thevenin, futur vainqueur :

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Didier Mussard, futur second interviewé par la radio RER :

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Alors que j’essaye de retrouver un second souffle, mes deux acolytes enclenchent le turbo ! Je ralentis, marche, tente de trottiner mais rien. Je patiente, mets les écouteurs en place et c’est la disco party. Je me mets à chanter, oui et assez fort d’ailleurs. Assez faux aussi, mais ce n’est pas grave car le public est plutôt tolérant (ou plutôt totalement absent). Bref, tout doucement, je retrouve de l’énergie et j’enclenche moi aussi le turbo. Mon renouveau débute au niveau de l’intersection GR R2, vers la variante menant au col de Bébour. Je passe les échelles, croise des randonneurs qui s’étonnent de découvrir qu’un coureur peut être un très mauvais chanteur.


Alors que le sentier est détrempé comme à l’accoutumée, je ne me pose pas de questions et fonce. Je reviens sur le coureur avec qui j’ai gravi le Kerveguen et le dépose. Je fais des tout droits dans la boue, glisse, me rattrape comme je peux. Je suis à bloc et surtout m’amuse. Je sais que ce sentier est long donc je ne me focalise pas sur ma montre. La végétation change rapidement. Les branles verts laissent place aux fameux pâturages de la Plaine des Cafres.

 

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Vers 14 h 45 (ma mémoire défaille sur l’horaire précis), me voici au poste de ravitaillement de Mare à Boue (62 Kms). Je m’assois, prends une soupe. On m’annonce 19 ème. Je perds cette place au profit d’un concurrent qui déboule et repars de suite. Les bénévoles sont aux petits soins, j’en profite mais pas trop. Je les remercie et repars pour une longue portion bitume-béton.

 

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Au moins deux coureurs se ravitaillent auprès de leurs proches. Je trottine au maximum. Puis, j’aperçois, au loin, Dominique Eclapier. Il est en marche rapide escorté par de nombreux proches, à pieds, ou en voitures. Les klaxons animent la plaine habituellement si paisible. Je reviens sur toute la bande au niveau de la route nationale. Ils m’encouragent, je les remercie. Je dépasse leur coureur de cœur et continue à bon rythme en direction du chalet des plâtres. Me revoilà entre les pâturages sous le regard songeur des vaches.


C’est toujours intéressant d’emprunter des sentiers que l’on parcourt généralement dans le sens inverse. Dans le cas précis, je me retrouve en sens opposé par rapport au circuit du grand raid. Si lors de la diagonale, c’est une partie où l’on peut reprendre des forces, relancer, avancer à vive allure, et bien là ce n’est pas la même histoire. C’est long, c’est costaud. J’essaye de ne rien lâcher. Si je cours sur les parties planes et en descentes, je marche très lentement en montée. Un nouveau coup de moins bien. Je marche maintenant même sur les parties planes. Mr Eclapier me revient dessus et me dépose à son tour. Il est aussi silencieux que moi. Et sorti de nulle part, ou plutôt d’un buisson, Christian effectue un contrôle sauvage. Je le remercie en lui disant qu’il faudra renforcer ce type de contrôle. Je lui raconte brièvement mes ressentis et poursuis mon périple. J’aperçois au loin le piton Textor.

 

 

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La satisfaction me gagne car j’ai encore presque deux heures de jour devant moi. Selon mon prévisionnel, je serais déjà avec ma frontale à cet endroit.


Me voici au piton Textor (72 kms), il est 16 H 15 (12 h 15 depuis le départ). Alors que j’arrive, Dominque Eclapier quitte le poste de ravitaillement. Il est de nouveau soutenu par sa troupe de supporters. Je ne fais que pointer et repars directement. Mon camel est encore plein. Le froid est de plus en plus présent et les bourrasques de vent me saisissent. A chaque rafale, la respiration se bloque.

 

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Je progresse dans le graton, monte, traverse la route quatre fois, passe devant la stèle Josémont Lauret et arrive à l'oratoire Sainte-Thérèse au-dessus du magnifique rempart de Basalte. 17 h 00. 

 

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A partir de l’oratoire, je peux de nouveau courir et m’amuser dans la descente. Un virage plus bas, j’aperçois Mr Eclapier. Nous descendons au même rythme. Le décor est sublime, les mélanges de couleurs sur la plaine des sables sont époustouflants. Ne connaissant pas la suite du parcours, je craignais de ne pas trouver le ravitaillement du volcan. Mais aucun souci, il fait encore jour ! Et comme le montre la photo, on ne peut pas le louper.

 

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Arrivé à la  Plaine des Sables, je trottine et accélère. Je reviens sur Dominique Eclapier qui marche. Il m’emboîte le pas et se met lui aussi à courir. La traversée est longue avant d’arriver au ravitaillement (79 kms). Je suis 17 ème. Je prends une nouvelle soupe, remplis mon camel. L’ambiance me réchauffe, merci aux bénévoles. Ma pause est courte car la nuit ne va pas tarder.

 

Merci à Trail Kreol pour les photos qui suivent :

 

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1005304_562393520465836_1747841781_n.jpgDominique Eclapier, en même temps que moi :


 

Laurent quelques minutes avant moi :

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Freddy Thevenin, futur vainqueur :

 

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Didier Mussard, futur second :

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J’évolue désormais en terrain inconnu. En effet, je ne connais pas le parcours jusque Grand Galet. Après la lecture de différents descriptifs, il ressort que la première partie est loin d’être évidente voire dangereuse. Mon objectif est clair, aller le plus loin possible de jour pour pouvoir gérer au mieux mes trajectoires, anticiper d’éventuels obstacles. C’est pour cela que je ne me suis pas éternisé au ravitaillement.

 

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Mr Eclapier et un coureur marron me devancent de 200 m. Ils marchent. Je donne alors un petit coup d’accélérateur pour les rejoindre avec l’idée de suivre leur rythme. Mais à quelques mètres de leurs chaussures, le duo accélère. Le coureur marron ralentit, je le double. Toujours au niveau de la plaine des sables, j’attends avec impatience la bascule afin de se séparer de ce vent frais qui commence à me congeler. Faut dire que je ne prends pas le temps d’enfiler mes gants, mon bonnet ni même mon k way. Il est 18 h 00 et j’ai froid. Bonne chance à tous les coureurs qui vont passer au cœur de la nuit.

 

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Nous plongeons en dévalant une pente de gratons. Gare aux dérapages incontrôlés. Dominque Eclapier s’éloigne à vive allure, je ne le reverrai plus jusque l’arrivée. A peine trois virages, et je dois me résigner à allumer ma frontale. Je réduis instantanément mon allure.

 


Me voici au fond de la ravine rocheuse de Grand Sable où j’essaye de débusquer le balisage à savoir des points blancs au sol. C’est loin d’être facile, je perds beaucoup de temps. Mais, beaucoup moins que si le sol avait été humide. Nous avons de la chance. Je me retourne, pas de frontale en vue. Puis, nouveau changement de décor avec l’apparition de végétations de petite taille. La pente est sévère, le sol instable, je déteste tout simplement. Je saute, glisse et me rattrape comme je peux. Je me tape la cheville contre les rochers, je fais un roulé boulé à terre. Mais, cela ne me freine pas. Je souffre en essayant de rester solide dans mes appuis.

 

 

Du côté du Grand Pays et sa forêt de bois de couleurs, le sentier devient propre. Cette fois, je me régale. Au niveau du Cap Blanc, après une courte mais sympathique montée, je reviens sur deux coureurs. Je saurai après coup qu’il s’agissait de Gilbert Ah Fat. Puis, à mon grand étonnement, je double un groupe de randonneurs.


Je traverse la rivière sur un petit pont aménagé et poursuis sur une longue portion plane le long d’une canalisation. Je me sens bien d’autant plus que je me doute de mon arrivée prochaine sur Grand Galet. Je retrouve la civilisation. Dans le village, c’est la vie habituelle d’un samedi soir. Dans certaines maisons, le repas de famille va bon train avec des éclats de rire et les odeurs de bons caris. Je croise un marmaille en vélo et lui demande où se situe le ravitaillement. Il me répond : « bientôt, à l’école ». J’y arrive (89 kms) et préviens que je ne fais que passer. Oui j’ai les réserves d’eau suffisantes pour la fin de course. Je leur demande juste d’attraper mon téléphone dans mon sac. Il est 20 H 38 quand j’appelle Natacha pour la prévenir de mon arrivée prochaine. Je l’informe, pour me motiver, de mon arrivée au stade dans une heure. Avant de m’éloigner du ravitaillement, les bénévoles m’encouragent et me disent que je suis 16 ème.


Je m’enfonce dans la nuit St Josephoise, descends et me retrouve devant un talus. NON !!! Je me suis planté de chemin. Je rebrousse chemin, remonte à fond…. Un coup de stress. Un passage devant la cascade Langevin et une longue portion bitumée le long de la rivière du même nom. Je cours la totalité hormis les montées les plus raides. Première traversée de pont, plusieurs habitants m’applaudissent. Arrivé au deuxième pont, je continue tout droit mais au bout de deux minutes, j’ai l’étrange sensation de me planter. Je croise une voiture, me mets devant elle, l’arrête et lui demande comment aller à St Joseph (sans monter dans leur voiture bien sûr!). Il m’indique le fameux pont qu’il fallait traverser. Ah non !!!!!!! Rebelote, je fais demi-tour, à fond. Après le troisième pont, je finis à un rythme de 14-15 km/heure.


Je reviens sur un coureur qui me demande si c’est encore loin. Je ne peux malheureusement pas lui donner d’indication. Moi-même, quelques minutes plus tard, je demande à une habitante où se situe la « balance canne », elle me répond à 650 m. C’est précis comme indication ! J’y arrive, passe sous la route nationale et je commence à croiser des finishers (raid et semi raid), des familles/amis de coureurs. L’arrivée se précise. A l’entrée du stade, je passe juste à coté de Natacha, Léane mais aussi mes amies Aurélie, Claire et Gigi. Je savoure la dernière ligne droite, fier de finir en 15 ème position d’un bel ultra comme ce raid 974. Finalement, je termine à la 16 ème place en 16 h 39. Soit je me suis fais doubler pendant mes plantages, soit le dernier coureur doublé était un semi raideur. L’organisation m’offre une médaille, un t shirt finisher et un ticket repas pour un rougaille saucisse.


Je retrouve Léane et lui offre ma médaille. Je commence à raconter ma vie, ma course emporté par ma satisfaction. Mes supportrices ont juste envie que j’arrête car elles ont faim. Faut dire que j’ai interrompu leur repas. Elles sont gentilles, elles écoutent patiemment mes histoires. Avant de partir, je salue Laurent qui rumine ses plantages de parcours qui lui ont surement coûté un top 10. Je le félicite de sa superbe course. Cela est très prometteur pour le reste de sa saison, notamment le grand raid, son objectif numéro 1. Il peut largement faire un top 30, ce n’est que mon avis. Un dernier tour dans le quartier où je ne trouve pas l’école où le repas est servi. Dommage, pour une fois que cela m’intéressait.

 

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  Le classement complet sur runraid : link


Place au bilan. J’ai vécu une superbe journée riche en beaux paysages, en belles émotions, en bonnes sensations. Je termine ces 100 kms très satisfait de mon raid, plutôt frais, décontracté et surtout non courbaturé. Cela s’est vérifié les jours suivant la course. Cela est assez rare pour moi donc je savoure d’autant plus. Une nouvelle fois, l’entraînement a payé la gestion de course a été optimale et la diététique mieux maitrisée. Merci à Gino et Fred pour leurs différents conseils. Finalement la partie la moins sympa de la journée aura été le retour sur St Denis. Le trajet était long même en voiture !

 

Prochaine aventure, fin août : l’ultra trail de Belledonne, l’échapée belle. 140 kms, 10 000 d+.

 

Photos : Thierry Hoarau pour le site randorun, Trail Kreol, Michel Jourdan, sources internet.

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commentaires

T
Salut !<br /> <br /> tout d'abord félicitation pour ton raid 974 de 2013 !!<br /> <br /> j'ai lu avec intérêt ton récit, car je fait la course en juin. Je voulais juste savoir si ton entrainement les deux mois précédent la course étaient sur le même modèle que le dernier mois ? (j'ai également lu ton récit sur le sujet).<br /> <br /> moi je suis à base de sortie longue nuit/jour 6-8h footing + rampes de la montagne A/R+ sentier de la vigie + footing plat +mercure+seuil+j'ai fait la transvolcano et vais faire le D-tour 60 comme prépa.<br /> <br /> j'ai un peu de questions sur le fait d'emporter 2 vêtement techniques ou 1 seul mais je pense quant même être bien niveau logistique (pas d'assistance) quant j'ai vu ta photo je pense t'avoir vu sur la montagne et/ou dans le sentier de la vigie...<br /> <br /> bref encore bravo et je ne dirais pas que j'espère faire comme toi car je pars sur une feuille de route de 22h.<br /> <br /> patrice
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Profil

  • Arnaud Moisan
  • Tu peux toujours courir... Et je cours, je me raccroche à mes baskets tant sur le tartan, le bitume ou les sentiers. Par ce blog, j'espère vous faire partager un peu de ma passion pour la course de fond
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